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Satya la vérité l'honnêteté

Aphorisme II.36 des Yoga Sutras de Patanjali

 SATYA

« Celui qui est ancré dans la sincérité de ses actes verra le fruit de ses actions accompli. » 

Pour le yogi, ou l’aspirant yogi, Satya consiste à être authentique et sincère.

 

Voilà pour la base. Assez naturellement, quand on pense vérité le terme communication surgit à l’esprit. Quand on communique, on est aussi bien émetteur que récepteur. Sur le plan énergétique, la communication est gérée par le chakra de la gorge, Vishuddhi qui englobe la communication sous toutes ses formes et inclut notre capacité d’écoute. Ce centre est le point d’extériorisation de tout ce que nous ressentons, et de tout ce qui nous tient à cœur : désirs, émotions, sentiments, raisonnements et questions. Ce chakra est celui de l’intégrité et de la justesse. Un chakra équilibré permet de penser ce que l’on dit et d’agir de même.

Chaque mensonge, verbalisé ou non, obstrue ce chakra. Chaque fois qu'on laisse une remarque passer sans réagir alors qu’il conviendrait de le faire, chaque fois qu’une situation nous bouleverse sans qu'on puisse identifier l’émotion qui monte, alors le chakra laryngé s’engourdit un peu plus. Donc, pour que l’énergie circule librement à cet endroit, il faut apprendre à tourner sept fois la langue dans sa bouche avant de parler (comme le rappelle le dicton), pour éviter de parler à tors et à travers et surtout se connecter à ce que l'on RESSENT. Car le corps SAIT ce qui est juste, par l'intermédiaire de Vishuddhi.

Un petit saut vers les accords Toltèques

Dans les Quatre accords toltèques, petit code de conduite de Don Miguel Ruiz, on trouve des règles simples et puissantes pour atteindre la liberté personnelle et le bonheur véritable. Ces règles sont très proches des yama et niyama. Le premier de ces accords est : « Que ta parole soit impeccable ». Une fois encore, la façon dont nous communiquons pointe le bout de son nez : pour être libre et heureux, il semble qu’il faille en passer par une parole intègre, en ne disant que ce que l’on pense (cela ne signifie pas pour autant dire TOUT ce que l’on pense), et en n’utilisant jamais la parole contre soi ou autrui. Il est donc judicieux d’apprendre la modération dans ses propos : ne pas en dire trop, ni trop vite. Une règle assez simple à appliquer avant de parler (après avoir tourné sept fois la langue dans sa bouche donc) : « Réfléchis avant de parler. » 

Comment contrôler notre communication ?

La parole se contrôle en deux temps : avant de parler, marque un temps d'arrêt pour examiner ce que tu vas dire. Ensuite, vérifie que tes paroles correspondent bien à ce qui est vrai, utile et nécessaire, en un mot : JUSTE.

Au passage, rappelons nous que les yama et niyama sont comme une échelle sur laquelle Satya suit Ahimsa, la non-violence : cela signifie que AHIMSA non violence PRIME sur SATYA vérité.

En effet : si la vérité risque de blesser profondément quelqu’un, alors notre devoir est peut-être de la garder pour soi. Le pouvoir du verbe sur le psychisme est conséquent : on a tous en mémoire une phrase blessante d’un parent, dont l’écho résonne encore à l’âge adulte. La parole est un outil qui peut détruire ou construire. Les mots ont du poids, et forgent notre réalité.

 

Il faut donc utiliser notre DISCERNEMENT, VIVEKA, notion bien plus profonde qu'elle n'en a l'air et sur laquelle nous reviendrons dans un article spécial. Car notre discernement "avant yoga" (ou avant travail sur soi disons) est largement entaché de subjectivité et d'ignorance à cause du voile de Maya (interaction entre le monde manifesté et nos perceptions). Large sujet traité à part lui aussi.

Ce n'est pas non plus parce qu'on pratique le yoga que notre parole est indubitablement vraie et juste. Mais disons qu'une lumière s'éclaire sur la palette infinie qui existe dans nos possibilités d'expression de "notre" vérité. Ainsi on devient plus conscient des écueils qu'il y a à parler trop, ou parler vite, ou parler faux... Et on en ressent tout  de suite les effets. Le yoga nous aide donc à mettre de la conscience dans notre expression, ce qui ne veut pas dire qu'on parle toujours "satya" mais on s'y efforce. 

 

Pour terminer, un exemple concret, vécu.

 

Exemple concret, vécu.

2017.

Je vis encore en Turquie dans la ferme yoguique écologique que j'avais fondée mais qui avait été détruite en 2012 suite à une catastrophe. Depuis 2012 je m'acharnais à faire renaître la ferme et grâce à mes amis, le lieu reprenait vie. Bien que le chemin fut d'une difficulté colossale pour moult raisons, je m'y accrochais car c'était ma seule voie de survie.

 

Dans ce contexte, Micheline Flak, disciple de Swami Satyananda et fondatrice de plusieurs lieux de yoga à Paris, que j'avais rencontrée en Inde et qui suivait les progrès de ma ferme tout en m'aidant financièrement, m'invite à un séminaire de yoga qu'elle organise fin juin.

 

Je n'ai aucun argent pour ce voyage, mais les amis m'aident et le jour dit, je suis à Paris pour le séminaire. J'y assiste d'un air assez détaché, me sentant totalement étrangère dans ce pays de France que j'ai quitté depuis... 26 ans... L'ambiance turque me manque et bien sûr ma petite ferme, les chats, les chiens, les arbres... Je me demande un peu ce que je fais ici.

 

La fin du séminaire arrive, je dois attendre que tous les invités soient partis pour enfin rencontrer Micheline et la remercier. Notre conversation est très brève, quelques nouvelles et soudain, avec un regard appuyé elle dit :

- Il est temps que tu rentres en France à présent.

 

Quoi ? 

Je reste stupéfaite et ne peux que balbutier un "au revoir Micheline" teinté d'incompréhension et de déception.

Comment ça rentrer en France ? Dans un pays où les bancs publics ont disparu pour que les sans-abris ne puissent pas dormir dehors ? Dans un pays où les gens s'appellent "personne" et cultivent la peur de l'autre ? Ah non alors, je veux rester en Turquie, là-bas au moins il y a des bancs partout, les gens s'appellent "frère" et s'aident mutuellement !

Je quitte la France et retrouve ma petite ferme de Turquie avec un grand soulagement.

Pourtant....

 

Un an après, en 2018, je vends la ferme et quitte la Turquie pour rentrer vivre en France.

Que s'est-il passé ?

Micheline Flak qui est une yogini avancée, possède ce fameux DISCERNEMENT : les fluctuations de son mental teinté par ses mémoires & conditionnements n'ont plus d'influence sur son expression.

Au moment où elle m'a dit : " Il est temps que tu rentres en France", ça n'est pas vraiment "elle" qui parlait, mais... ce qui est Supérieur. Elle était le canal d'une information de l'univers et elle me l'a transmise, sans fioriture ni couleur. 

C'était une parole JUSTE. 

Bien sûr pour moi qui étais dans l'acharnement aveugle à remonter ma ferme, je n'ai rien compris, pourtant les choses se sont faites, sans même que je me rappelle des paroles de Micheline.

 

C'était SATYA.  « Celui qui est ancré dans la sincérité de ses actes verra le fruit de ses actions accompli. »  

 

Alors même si nous n'en sommes pas à cette préscience, cultivons SATYA, autant pour nous que pour les autres. Car le travail de SATYA nettoie à lui seul beaucoup de nos conditionnements (comme la peur de l'opinion des autres, frein majeur à notre expression, qui nous empêche d'être aligné avec nous-même). 

Le travail sur SATYA, comme tous les yamas et niyamas marche comme un cercle vertueux qui s'auto engendre. Plus on avance, plus on monte, plus les choses s'ouvrent et s'éclairent. C'est Maya qui se fait plus fine et Viveka le discernement qui s'affermit.

 

Hari Om Tat Sat

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